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Décembre 2023 - Atterrissage 1912

Un atterrissage en douceur à Breteuil... en 1912

L’un des tout premiers aéroplanes à s’être posés à Breteuil ou dans les environs a été immortalisé par la photographie et la carte postale. Il s’agit d’un biplan qui participait aux grandes manœuvres organisées au mois d’août 1912. Créée par la loi du 29 mars 1912, l’aéronautique militaire est, pour la première fois, associée à ces manœuvres annuelles.

C’est le général Marie-Georges Picquart (1854-1914), qui dirige ces opérations. Il commande, depuis 1910, le 2e corps d’armée, à Amiens, après avoir été brièvement ministre de la Guerre dans le premier gouvernement Clemenceau, mais surtout pour avoir joué un rôle déterminant lors de l’affaire Dreyfus où sa remarquable ténacité permit d’innocenter le capitaine Dreyfus et de démontrer la culpabilité du commandant Esterhazy[1].

Breteuil est au premier plan de ces manœuvres de 1912, comme en témoigne un habitant de Breteuil dans l’une de ses correspondances, le 27 août : « Sommes encombrés d’officiers. Général Picard [sic] et Général Rousseau ici sont partis avec artillerie et cavalerie vers St-Just[2] ». La presse régionale se fait l’écho de ces mouvements de troupes et du rôle d’observation et d’étude que joue l’aviation naissante dans le cadre de ces grandes manœuvres. Ainsi, un journaliste du Progrès de la Somme peut-il écrire dans l’édition du 27 août 1912 :

 

« Entre Clermont et Bulles, ce matin, [le rédacteur écrit le 25 août], nous filons à toute allure, en compagnie de l’aviateur Martinet, qui étudie, par la route, les terrains mouvementés, vastes plaines, bosquets ou coteaux, dans lesquels la troisième division et la division provisoire se rencontreront, la semaine prochaine, pour livrer les derniers combats et terminer les manœuvres dans une charge triomphale[3] ».

 

L’aviateur Martinet en question n’est autre que Robert Martinet (1885-1917), pionnier de l’aviation, qui venait de recevoir la Légion d’honneur, le 14 juillet 1912, à Compiègne pour ses exploits aéronautiques, et qui devait décéder pendant la guerre lors d’un essai aérien sur le front balkanique. Martinet, qui avait obtenu son brevet de pilote en 1910, était devenu l’une des gloires montantes de l’aviation, et pilotait alors le plus souvent un biplan de modèle Farman.

 

C’est peut-être ce biplan qui vint délicatement atterrir, le 25 août 1912, à flanc de côteau, dans un champ bordant la route de Paillart. On peut très précisément situer son lieu d’atterrissage puisque, sur la carte postale photographique, on distingue à l’arrière-plan, à droite la chapelle Saint-Cyr, et à gauche les bâtiments du moulin Belloiseau.

L’affluence de population constatée sur la photographie dénote le caractère plutôt exceptionnel de cet événement. Une population de tous âges mais plutôt de milieux populaires, la pratique aéronautique étant alors réservée à une élite économique et sociale. Même si le nom de l’aviateur demeure encore inconnu (des recherches plus approfondies pourraient peut-être permettre de l’identifier), on peut supposer que c’est Robert Martinet qui apparaît avec un autre mécanicien devant l’appareil. En revanche, un autre personnage, fort bien mis, et qui semble poser pour le photographe devant le biplan, demeure totalement inconnu.

 

Deux semaines après la grande fête patriotique de Breteuil, organisée le 11 août 1912, et au cours de laquelle un aéroplane suspendu à un fil au-dessus de la rue de Paris, conçu par l’entrepreneur de bâtiments Clodomir Martin (1864-1931), avait fait grande sensation auprès du public, l’atterrissage du biplan dans notre commune au cours des grandes manœuvres de Picardie suscite un vif intérêt de la part de la population britulienne, tout en participant à renforcer le sentiment patriotique, 2 ans presque jour pour jour avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale.

 


[1] Le général Picquart devait mourir à Amiens, quelques mois avant la Première Guerre mondiale, des suites d’une chute de cheval.

[2] Archives privées.

[3] Le Progrès de la Somme, 27 août 1912.